Gaz de schiste algérien : le double discours de la France
Publié le 30/01/2018
Illustration non contractuelle: Pixabay
La députée Muriel Ressiguier (France Insoumise) a posé au Ministre de la transition écologique une question écrite pour alerter sur le fait que la France compte importer du gaz de schiste d’Algerie et renforcer pour cela les réseaux de gazoducs . Si sa question et sa préoccupation concernant les conséquences locales de ce projet sont légitimes, ce n’est malheureusement que la partie émergée de la partie de poker-menteur qui se joue en Algérie autour de l’exploitation du gaz de schiste.
« Officiellement », le gouvernement algérien dit prendre son temps avant de décider de d’autoriser la fracturation hydraulique.
Objectivement, la baisse des cours du pétrole ayant affecté l’économie, l’issue ne fait aucun doute, d’autant que Sonatrach, l’entreprise publique chargée de l’exploration et l’exploitation des ressources pétrolières, est très « écoutée » du pouvoir, ce qui est un doux euphémisme.
Qualifié de hold-up économique par certains opposants, l’exploitation du gaz de schiste en Algérie porte en lui tous les ferments d’une contestation environnementale, mais aussi politique.
Le Ministre de la ressource en eau, Hocine Necib, multiplie les annonces visant à rassurer sur les projets d’assainissements envisagés pour rattraper le retard en matière d’épuration des eaux usées. Il n’en reste pas moins que l’Algérie reste dans une situation sanitaire et environnementale inquiétante et le recours à la fracturation hydraulique va aggraver la situation.
On se dirige donc tout droit vers une impasse tant politique qu’environnementale : l’exploitation des gaz de schistes nécessite une quantité considérable d’eau et surtout laisse derrière elle une quantité non moins considérable d’eau polluée, sans parler bien sur des risques de pollution des nappes phréatiques par les mini-tremblements de terre provoqués par la fracturation.
Or, les pays du Maghreb sont déjà durement touchés par une crise de l’eau, à tel point que la Banque Mondiale considère dans un rapport récent que cette situation pourrait-être le terreau d’une déstabilisation majeure de l’Afrique du Nord, que l’on a déjà vu poindre sous le nom de « révolutions de la soif ».
La fracturation hydraulique doit être interdite dans les pays du Maghreb, en tout premier lieu pour la préservation de la ressource en eau.
C’est dans ce contexte que la France, qui a interdit la fracturation hydraulique sur son territoire, va dans le sens opposé en Algérie, où Total vient de signer un accord de partenariat avec la Sonatrach pour l’exploitation du gaz non conventionnel algérien.
L’exploitation du gaz de schiste doit être interdite en Algérie, comme elle l’est en France.
La France doit s’engager résolument dans un partenariat positif avec le Maghreb, interdire les pratiques douteuses de nos entreprises fussent-elles parmi le fleuron de notre économie, et refuser l’importation de produits issus de techniques qu’elle se refuse, à juste titre, à employer sur son territoire.
Bertrand Rio pour Objectif Transition