Extension de CLESUD et risques environnementaux
A l’occasion de la concertation organisée par Miramas et Grans sur le projet d’extension de CLESUD qui entraîne la bétonisation de 55 hectares de terres agricoles, Objectif Transition tient à saluer le travail de la MRAE (Mission Régionale d’Autorité Environnementale) qui alerte sur les risques d’un tel projet et publie ci-dessous l’avis rendu lors de la modification du PLU (Plan Local d’Urbanisme) de Grans.
Avis de la Mission Régionale d’Autorité environnementale de Provence-Alpes-Côte d’Azur sur le Plan Local d’urbanisme (PLU) de Grans (13)
n° saisine 2017-1505 n° MRAe 2017APACA29
Préambule
L’évaluation environnementale des plans et programmes est une démarche d’aide à la décision qui contribue au développement durable des territoires.
Elle donne lieu à l’élaboration d’un rapport sur les incidences environnementales du plan par le responsable de ce dernier et a pour objectif de rendre plus lisibles pour le public les choix opérés au regard de leurs éventuels impacts sur l’environnement.
Elle vise donc à permettre d’améliorer la conception du plan et la participation du public à l’élaboration des décisions.
Suivant la réglementation européenne l’avis d’une Autorité environnementale, en l’occurrence la mission régionale de l’autorité environnementale (MRAe) de la région Provence Alpes Côte d’Azur,
apprécie la prise en compte de l’environnement par le plan et programme et la qualité du rapport sur ses incidences environnementales. Cet avis n’est ni favorable ni défavorable à la réalisation du plan ou du programme.
La MRAe s’appuie sur la DREAL pour élaborer son avis et dispose d’un délai de trois mois, à compter de la date de réception de la saisine, pour formuler son avis pour lequel elle consulte notamment l’Agence régionale de santé (ARS).
L’avis devra être porté à la connaissance du public par le responsable du plan au cours de l’enquête publique. Pour la complète information du public, une bonne pratique consiste à produire un mémoire en réponse dans lequel le responsable du plan indique comment il entend prendre en
compte les recommandations de l’autorité environnementale. Enfin, le responsable du plan rendra compte, notamment à l’autorité environnementale, lors de l’approbation du plan de la manière dont
il prend en considération cet avis.
Conformément aux dispositions de l’article R.104-25, l’avis est également publié sur le site des MRAe : http://www.mrae.developpement-durable.gouv.fr et de la DREAL : http://www.paca.developpement-durable.gouv.fr/avis-de-l-autorite-environnementale-r2082.html
Sommaire de l’avis
Préambule…………………………………………………………………………………………………………. 2
Synthèse de l’avis……………………………………………………………………………………………….. 4
Avis…………………………………………………………………………………………………………………… 6
- Contexte et objectifs du plan, enjeux environnementaux, qualité du rapport sur les
incidences environnementales et de la démarche d’élaboration du PLU…………………….. 6
1.1. Contexte et objectifs du plan…………………………………………………………………………………. 6
1.2. Principaux enjeux identifiés par l’autorité environnementale (Ae)……………………………….. 6
1.3. Qualité formelle du rapport sur les incidences environnementales……………………………… 7
1.4. Prise en compte de l’environnement dans la démarche d’élaboration du PLU………………. 7 - Analyse de la prise en compte de l’environnement et des impacts du plan……………… 7
2.1. Sur les besoins fonciers et la gestion économe de l’espace………………………………………. 7
2.2. Sur la ressource en eau de la nappe de la Crau………………………………………………………. 9
2.3. Sur la biodiversité………………………………………………………………………………………………. 11
2.4. Sur le paysage………………………………………………………………………………………………….. 13
2.5. Sur l’eau potable et l’assainissement……………………………………………………………………. 14
2.6. Sur les risques………………………………………………………………………………………………….. 14
2.7. Sur l’énergie, la mobilité, la qualité de l’air et la lutte contre le dérèglement climatique (dont
émission GES)………………………………………………………………………………………………………… 15
Synthèse de l’avis
La commune de Grans est une commune à caractère résidentiel, qui accueille par ailleurs une zone d’activités identifiée comme pôle économique régional majeur, en limite de la réserve naturelle nationale des Coussouls de Crau.
La démarche d’évaluation environnementale du projet de PLU a utilement permis de prendre en compte le risque d’inondation, et de reconsidérer certains périmètres ouverts à l’urbanisation dans le précédent PLU.
Néanmoins, une analyse globale amont, portant sur l’état des lieux de l’environnement du territoire et les alternatives d’aménagement, aurait permis de requestionner certaines orientations susceptibles d’impacts sur l’environnement et d’argumenter les choix de développement de la commune. C’est en particulier le cas pour la zone à vocation d’habitat des Arènes, prévue en site Natura 2000 avec de fortes incidences sur la biodiversité, le paysage et la consommation de surfaces irriguées contribuant au rechargement de la nappe de la Crau, et de nature à favoriser les déplacements automobiles au détriment des modes actifs.
De manière générale, les densités cibles des zones ouvertes à l’urbanisation sont peu élevées (16 logements/ha en moyenne), alors que la vulnérabilité de la nappe de la Crau et la nécessité du maintien des surfaces de prairies irriguées incitent à une sobriété dans la consommation d’espaces.
L’extension de la vaste zone d’activités de CLESUD mériterait d’être précisément justifiée, car elle s’inscrit au sein et en limite de milieux hautement sensibles du point de vue environnemental, sur une surface importante de 55 ha. Au vu de l’ampleur du projet, la justification des choix doit être apportée à une échelle a minima intercommunale, voire métropolitaine. Les mesures de réduction et de compensation esquissées n’apparaissent pas à la hauteur des enjeux identifiés et des incidences potentielles du projet.
Enfin, l’analyse des incidences « Natura 2000 » ne conclut pas de manière claire sur les éventuels effets résiduels significatifs sur l’état de conservation des habitats naturels et des espèces d’intérêt
communautaire qui ont justifié la désignation des sites Natura.
Recommandations principales :
• Modérer la consommation d’espace et l’étalement urbain, en densifiant les zones ouvertes à l’urbanisation pour les besoins résidentiels et en définissant finement les besoins fonciers pour le développement des activités.
• Justifier les choix d’ouverture à l’urbanisation par l’analyse de solutions de substitution. En absence d’alternatives, définir des mesures de compensation précises, localisées et proportionnées en termes de préservation de la nappe de la Crau, de limitation des ruissellements, de préservation de la biodiversité et de l’identité paysagère du territoire.
• Étudier et qualifier les effets cumulés des projets prévus à l’échelle de la commune sur la ressource en eau, la biodiversité et le paysage.
Avis
Cet avis est élaboré sur la base du dossier composé des pièces suivantes :
• rapport sur les incidences environnementales (RIE),
• projet d’aménagement et de développement durable (PADD),
• orientations d’aménagement et de programmation (OAP),
• règlement, plan de zonage, annexes.
1. Contexte et objectifs du plan, enjeux environnementaux, qualité du rapport sur les incidences environnementales et de la démarche
d’élaboration du PLU
1.1. Contexte et objectifs du plan
La commune de Grans, 2 760 ha et 4 320 habitants (en 2012), est une commune à caractère résidentiel. Elle accueille par ailleurs une zone d’activités et une plate-forme logistique multimodale, identifiées comme pôle économique régional majeur, qu’elle partage avec la commune de Miramas en limite des coussouls de la Crau.
La commune se situe au centre d’un paysage ouvert sur de vastes espaces agricoles, adossé au massif forestier de Pont de Rhaud. Le village s’est d’abord développé le long de la Touloubre, puis s’est étendu ces trente dernières années sur les espaces agricoles et forestiers au sud et à l’est, avec des franges d’urbanisation très diffuses. Ces extensions urbaines ont essentiellement permis d’accueillir des lotissements pavillonnaires, fortement consommateurs d’espace.
Grans s’inscrit dans le territoire Ouest Provence de la métropole Aix-Marseille Provence, et appartient au périmètre du SCoT2 Ouest Étang de Berre. La commune dispose d’une très bonne desserte routière offrant un accès rapide aux principaux pôles d’emplois du département, via les autoroutes A54, A7 et A8, et les routes nationales 113 et 569. Elle bénéficie par ailleurs de la proximité de l’aéroport de Marseille-Provence-Marignane, ainsi que des gares SNCF de Miramas et de Salon-de-Provence.
Le projet de PLU, objet du présent avis, affiche notamment les objectifs de « réévaluer les espaces d’extension urbaine », d’ « adapter des zones d’activités aux besoins économiques », et de « prendre en compte le risque inondation ». La commune s’est fixé l’objectif de ne pas ouvrir, d’ici 2030, de nouvelles zones à l’urbanisation pour les besoins résidentiels, autres que celles déjà prévues et délimitées dans le PLU de 2011. Le PLU prévoit par ailleurs une reconfiguration des périmètres dédiés aux zones d’activités économiques (+38 ha), avec l’extension de la zone de CLESUD à l’ouest, et la réduction de celle de Camp Jouvens à l’est.
1.2. Principaux enjeux identifiés par l’autorité environnementale (Ae)
Au regard des enjeux du territoire et des effets potentiels du plan, l’autorité environnementale identifie les enjeux suivants :
• la préservation des espaces naturels et agricoles, ainsi que la valorisation des continuités écologiques et de la biodiversité, sur ce territoire particulièrement riche ;
• la bonne adéquation entre les projets d’urbanisation du PLU et les réseaux divers (eau potable, assainissement), afin de garantir la préservation qualitative et quantitative de la masse d’eau de la Crau, ressource stratégique et vulnérable ;
• la préservation et la valorisation de l’identité paysagère du territoire, la commune étant identifiée comme secteur à enjeux dans l’atlas des paysages des Bouches-du-Rhône ;
• la prise en compte des risques naturels dans les choix des secteurs d’urbanisation.
1.3. Qualité formelle du rapport sur les incidences environnementales
Le rapport sur les incidences environnementales est complet, avec un effort d’illustration et d’exposé des connaissances actuelles pour chaque thématique. Les synthèses proposées en fin de chapitre facilitent la lecture du dossier, qui présente des descriptions détaillées parfois difficiles à appréhender par le grand public.
1.4. Prise en compte de l’environnement dans la démarche d’élaboration du PLU
Le rapport de présentation indique que la démarche d’évaluation environnementale a utilement permis de :
• réduire le développement de la zone d’activités de Camp Jouven, au regard de la connaissance du risque d’inondation, et d’adapter les OAP des secteurs concernés ;
• prendre conscience de la nécessité de limiter le périmètre de la zone d’activités CLESUD, initialement prévue sur l’emprise de la réserve naturelle régionale et les sites Natura 2000.
Le rapport précise que « le fort niveau d’enjeux environnementaux du territoire a parfois été ressenti comme un frein aux projets ; la proposition de mesures d’adaptations de ces derniers a été nécessaire ». Si des mesures d’adaptation des projets ont effectivement été recherchées, il ressort qu’une analyse globale amont, portant sur l’état des lieux de l’environnement du territoire et les alternatives d’aménagement, aurait permis de requestionner certaines orientations susceptibles d’impacts sur l’environnement. Cette analyse globale aurait a minima permis d’argumenter les choix de développement de la commune, tel que la zone à vocation d’habitat des Arènes prévue en site Natura 2000, avec de fortes incidences sur la biodiversité, le paysage et la consommation de surfaces irriguées contribuant au rechargement de la nappe de la Crau.
2. Analyse de la prise en compte de l’environnement et des impacts du plan
Le présent chapitre de l’avis n’a pas vocation à être exhaustif mais procède à la lecture critique du dossier pour les champs de l’environnement les plus impactés par la mise en œuvre du plan.
2.1. Sur les besoins fonciers et la gestion économe de l’espace
La commune connaît une activité économique importante, et se caractérise par une attractivité constante et régulière pour l’accueil de nouvelles populations.
Bilan de la consommation foncière et perspectives
Entre 2003 et 2014, 106,63 ha ont été consommés :
• pour les 3/4 au profit des activités économiques au sein du projet CLESUD 1, soit plus de 80 ha en extension de l’enveloppe urbaine définie en 2003 ;
• 20 % pour les besoins résidentiels, principalement au sein de l’enveloppe urbaine ;
• 5 % pour les besoins des exploitations agricoles et habitations associées.
crédit photo: Bertrand Rio
Au total, 90 ha d’espaces agricoles et 2 ha d’espaces naturels ont été consommés entre 2003 et 2014.
L’évolution du zonage entre le PLU 2011 et le projet de PLU est clairement explicitée à l’aide de cartographies. Elle présente une perte de 49 ha en zones agricoles et un gain de 13 ha en zones naturelles. Ces évolutions sont essentiellement liées à des projets d’extension de la zone d’activités de CLESUD, du projet d’urbanisation des Arènes et de la réduction de l’emprise de la zone d’activités de Camp Jouven.
Besoins fonciers en logements
L’hypothèse de croissance démographique retenue de +1,1 % /an, supérieure à la moyenne envisagée par le SCoT à l’échelle intercommunale, correspond au rythme constant connu par la commune depuis les années 1990. Afin de répondre au besoin de desserrement des ménages et à l’accueil de 800 habitants supplémentaires, le PLU prévoit la création de 615 logements d’ici 2030.
La commune affiche l’objectif de ne pas créer d’ici 2030 de nouvelles zones à l’urbanisation pour les besoins résidentiels, autres que celles déjà prévues et délimitées dans le PLU de 2011. Néanmoins, le PADD ne précise pas les objectifs de modération de la consommation d’espace et de lutte contre l’étalement urbain alors que la commune se caractérise par un tissu urbain très lâche, illustré notamment par une proportion très importante de maisons individuelles (les logements collectifs y sont trois fois moins nombreux qu’à l’échelle des Bouches-du-Rhône).
Le PLU présente une étude de densification identifiant le foncier disponible au sein des espaces bâtis, en associant des densités cibles pour chaque zone et en excluant les EBC3 ainsi que les parcelles soumises à un risque inondation élevé4 . Les capacités résiduelles permettraient ainsi la réalisation de 420 logements, répartis pour moitié sur des unités foncières libres, et pour moitié sur des parcelles à diviser. L’application d’un fort taux de rétention foncière (70%) sur ces terrains, détenus par des propriétaires privés désireux de conserver le cadre résidentiel actuel, conduit à réduire ces possibilités à 125 logements, soit seulement 20 % des besoins estimés.
Il ressort de cette analyse que :
• dans les secteurs déjà urbanisés: le taux très élevé de rétention foncière conduit tout juste à atteindre l’objectif de 20 % de logements supplémentaires au sein des tissus urbains existants fixé par le SCoT ; le calcul du potentiel de densification et de mutation des espaces bâtis évalue à 8,5 ha le potentiel de parcelles libres en zone urbaine ;
• hors tissu urbain existant, avec une estimation de 490 nouveaux logements : le foncier nécessaire pour réaliser ces logements n’est pas estimé, et la simple référence aux 30 ha déjà disponibles dans « les zones à urbaniser délimitées avec le PLU de 2011 » conduit à une densité moyenne de 16 logements/ha, proche de celle des zones UD du précédent PLU. Ces éléments ne traduisent pas de volonté particulière de modération de la consommation d’espace, et n’apparaissent par ailleurs pas cohérents avec l’objectif affiché de diversification en faveur de logements collectifs et logements locatifs sociaux. Trois zones à vocation d’habitat sont concernées : les Arènes (1AU), les Pélenches (2AUa) et les Aréniers (2AUb). Sur la zone des Arènes, la densité moyenne (23 logements/ha) est par ailleurs inférieure aux hypothèses5 de calcul du potentiel de densification et de mutation des espaces bâtis (p.69, RP tome 1).
Ces éléments sont de nature à favoriser un mode de développement urbain semblable à celui des dernières décennies, pourtant dénoncé par le rapport (forte consommation d’espaces, paysage mité et banalisé).
Recommandation 1 : Fournir des objectifs chiffrés de modération de la consommation d’espace et de lutte contre l’étalement urbain, préciser la superficie de foncier nécessaire pour les besoins résidentiels, et revoir à la hausse les densités cibles. Réduire en conséquence le périmètre des zones ouvertes à l’urbanisation.
Besoins fonciers en activités et services
La commune prévoit d’assurer son développement économique avec l’extension de la zone d’activités de CLESUD (zone 1AUEb, couverte par une OAP d’environ 55 ha), et le foncier disponible à Camp Jouven (zone AUEa, dont l’emprise a été réduite de 17 ha par rapport au PLU 2011).
Si les objectifs apparaissent louables du point de vue de l’environnement (concentration en un même lieu d’activités logistiques en prolongement d’une zone existante, développement de l’intermodalité), le rapport n’expose aucune analyse à l’échelle de la zone d’activités dans son ensemble , partagée avec la commune de Miramas, et ne repositionne pas le projet dans un contexte géographique et temporel plus large (situation et perspectives à l’échelle intercommunale, métropolitaine, voire régionale du fait de son rayonnement affiché). Aucune alternative n’est véritablement étudiée. Ces éléments font défaut pour faire comprendre et justifier l’extension de la très vaste zone CLESUD sur le territoire de la commune de Grans, au sein et en limite de milieux hautement sensibles du point de vue environnemental. La justification des besoins fonciers en activités reste donc succincte, affirmative, avec une vision de court terme, dénuée d’éléments précis et réellement prospectifs.
Recommandation 2 : Argumenter et quantifier les besoins fonciers en zones d’activités et de services dans la zone de CLESUD.
2.2. Sur la ressource en eau de la nappe de la Crau
Correctement identifié dans le rapport, l’enjeu de préservation de la masse d’eau souterraine de la Crau est particulièrement important. Il s’agit d’une ressource stratégique qui assure l’alimentation en eau potable de 270 000 habitants, et dont l’état (quantitatif et chimique) est considéré comme très bon. La nappe présente une forte vulnérabilité identifiée dans le SDAGE Rhône-Méditerranée, qui s’explique notamment par :
• ses conditions de recharge, car son fonctionnement hydraulique dépend de l’activité de l’irrigation gravitaire sur la plaine, qui assure 70% de sa recharge ;
• les effets des changements climatiques7 (et la probable hausse du débit réservé de la Durance en conséquence), qui accentuent la fragilité de l’irrigation gravitaire, avec un impact direct sur la recharge de la nappe phréatique les années de restriction d’eau ;
• son caractère affleurant et l’environnement général, qui la rendent particulièrement vulnérable aux infiltrations de pollutions de surface diffuses et ponctuelles (bétails, voies de transit).
Plus de 60% du territoire communal (dans sa partie nord) se situe sur l’emprise de la nappe libre de la Crau. Le maintien des surfaces de prairies irriguées et du fonctionnement des canaux est indispensable à l’équilibre quantitatif de la ressource (recharge et prélèvement), et nécessite plus qu’ailleurs une démarche de sobriété dans la consommation d’espace. D’autre part, la résurgence de la nappe (source Mary-Rose) constitue la seule source d’alimentation en eau potable pour la commune.
Document Symcrau
L’urbanisation des zones de CLESUD et des Arènes induira la disparition de surfaces irriguées, avec des incidences négatives résiduelles que le rapport qualifie de « modérées ». Il est à souligner que l’extension de la zone 1AUEb, d’une surface importante (55 ha), est prévue dans une zone de sauvegarde à préserver pour le futur.
Enfin, les espaces agricoles sont aménagés en casiers et constituent des zones d’étalement des eaux permettant de limiter fortement les ruissellements en aval. Il convient de s’assurer que l’impact hydraulique (protecteur pour les zones aval) fera l’objet d’une compensation adaptée et complémentaire à la compensation liée à l’imperméabilisation des sols.
Recommandation 3 : En lien avec la recommandation 2, réétudier les perspectives d’ouverture à l’urbanisation de la commune en favorisant la densification des zones déjà urbanisées et en limitant la conversion de surfaces agricoles irriguées. En l’absence d’alternatives, les choix devront être justifiés et les mesures de compensation et d’accompagnement adaptées aux enjeux de préservation de la nappe de la Crau.
Compte tenu des autres projets susceptibles d’émerger à proximité (transport combiné, A56), il est indispensable de mener une analyse des effets cumulés du projet avec d’autres projets connus au sein de la commune et au-delà. Le rapport conclut notamment que « les incidences du PLU sur la ressource en eau sont positives à neutres sauf pour les eaux souterraines du fait de la vulnérabilité de la nappe de la Crau, qui participe aussi à alimenter la Touloubre. Une vigilance est nécessaire notamment au regard des effets cumulés potentiels avec les projets d’autres collectivités ». La seule définition d’un indicateur de suivi ne peut suffire à évaluer, et si nécessaire réajuster par des rétroactions, l’incidence de la mise en œuvre du projet sur la ressource en eau.
Recommandation 4 : Étudier et qualifier les effets cumulés des projets prévus à l’échelle de la commune sur la ressource en eau. Transcrire dans le PLU (OAP, zonage, règlement) les mesures nécessaires à la sécurisation structurelle de la ressource en eau, en lien notamment avec l’étude ressource stratégique menée par le SYMCRAU .
crédit photo: Rémi Ruffer crédit photo: Wikipedia
2.3. Sur la biodiversité
Le rapport présente un état initial de qualité et souligne, à juste titre, la grande richesse et la sensibilité écologique du territoire. Celui-ci est concerné par de multiples périmètres patrimoniaux, réglementaires ou contractuels : deux sites Natura 200010 couvrant 41 % du territoire, trois ZNIEFF11 terrestres et une ZNIEFF géologique, une ZICO12, une réserve naturelle régionale et plusieurs zones humides aux abords de la Touloubre notamment. La commune est par ailleurs concernée par le plan national d’actions en faveur de l’Aigle de Bonelli et du Faucon crécerellette, la Crau étant l’unique site français de reproduction régulière de ce dernier.
Compatibilité avec le SCoT
L’extension de la zone d’activités de CLESUD et le projet d’urbanisation des Arènes sont en partie situés dans le réservoir de biodiversité de la Crau Verte (p.168, RP13 tome 1). Selon les termes du SCoT, il conviendra d’une part de préciser comment le PLU assure la stricte protection de la fonctionnalité écologique de ces espaces, et d’autre part de démontrer la nécessité d’extension de la zone d’activités de CLESUD plutôt que d’autres choix d’aménagement, à l’échelle du ScoT, permettant le développement économique recherché.
Recommandation 5 : Démontrer précisément la compatibilité du PLU avec le SCoT Ouest Étang de Berre sur les secteurs de CLESUD et des Arènes, notamment en ce qui concerne la préservation des milieux naturels et la fonctionnalité écologique de ces espaces.
Trame verte et bleue
Le PADD a bien identifié l’enjeu de préservation de la Crau « irriguée », qui constitue une partie importante de la trame verte et bleue, menacée par la disparition des prairies de foin de Crau. La diminution des surfaces de prairies irriguées étant de nature à limiter les apports en eau à la nappe de la Crau, cet enjeu rejoint directement celui de la préservation de la ressource en eau (cf. supra).
La trame verte et bleue à l’échelle communale, ainsi que les principales continuités écologiques sont retranscrites dans le rapport, en cohérence avec le SRCE15. Le projet de PLU met également en évidence le rôle de corridors écologiques joué par les espaces naturels, agricoles bocagers, les multiples canaux d’irrigation et leurs cordons boisés, ainsi que la Touloubre et sa ripisylve. Toutefois, le règlement n’offre pas de protection pour toutes ces zones où la préservation des continuités est requise, en particulier pour les ripisylves de la Touloubre et les milieux humides associés.
Recommandation 6 : Traduire dans le projet de PLU la protection des continuités écologiques, dont l’enjeu a bien été identifié (zonage indicé, traduction de la protection dans le règlement).
Incidences sur les sites Natura 2000 et à enjeux écologiques
Les périmètres à statut et à enjeux écologiques entrent en conflit avec plusieurs zones ouvertes à l’urbanisation (extension de la zone d’activités de CLESUD, projets d’urbanisation des Arènes et des Aréniers), avec des incidences potentielles sur la biodiversité et les continuités écologiques :
• Zone 1AUEb – CLESUD 2 :
l’emprise directe du projet s’inscrit sur une zone à enjeux écologiques forts dans sa partie nord (prairies de fauches bocagères) à faibles en partie ouest (vergers), et à enjeux très forts dans la zone d’influence du projet dans laquelle les prospections de terrain ont été menées.
Malgré les mesures de réduction des impacts proposées, les incidences potentielles sont relativement conséquentes : destruction de 29 ha de prairies bocagères et 9,5 km de haies (dont 3,5 km de haies pluri-spécifiques), atteintes très fortes sur la faune de la réserve naturelle régionale Poitevine-Regarde-Venir16 située en limite du projet (chiroptères, habitats de plusieurs espèces d’oiseaux avec de très forts enjeux de conservation). La prairie de foin de Crau ainsi que les haies bocagères associées font office de zone tampon et atténuent l’impact de l’actuelle plate-forme logistique sur la tranquillité des espèces fréquentant les coussouls, reconnus comme habitats d’intérêt prioritaire au sens de la directive Natura 2000. L’OAP intègre plusieurs mesures (marges de recul et aménagements paysagers) qui ne suffisent cependant pas à compenser la perte de fonctionnalités de l’actuelle zone tampon et du réseau de haies.
Le rapport indique que des mesures de compensation restent à rechercher (« compensation 1/1 des surfaces en prairie irriguée par des parcelles en friche sur Miramas notamment mais à ce jour la compensation 1/1 reste à rechercher »), et que d’autres mesures « devront être prises en compte lors de la conception/réalisation des projets d’aménagements ». Aucune garantie, ni sur la faisabilité des mesures, ni sur leur réalisation, ni même sur leur proportionnalité aux incidences qu’elles sont censées compenser ne sont apportées. Sur ce dernier point, une étude solide et argumentée du ratio de compensation nécessaire aurait été bienvenue pour assurer une totale transparence vis-à-vis des porteurs de projet. En conclusion, les mesures esquissées n’apparaissent clairement pas à la hauteur des enjeux identifiés et des incidences potentielles du projet.
• Zone 1AU – Les Arènes :
la zone est majoritairement occupée par des prairies de fauche d’intérêt communautaire et des canaux d’irrigation, maillons de la trame verte et bleue. Le rapport ne présente pas les résultats des prospections écologiques, qui auraient permis d’appréhender les enjeux écologiques et les incidences potentielles du projet : destruction de 7 ha de prairies fauchées méso-hygrophiles méditerranéennes, et destruction d’habitat de l’Agrion de Mercure notamment. Le niveau d’incidence faible retenu dans l’évaluation des incidences Natura 2000 paraît sous-estimé compte tenu de l’enjeu local de conservation des prairies de foin de Crau. Le pourcentage de surface d’un habitat détruit par rapport à sa surface totale sur un site Natura 2000 n’est pas un indicateur pertinent. Le rapport propose par ailleurs quelques mesures (conservation d’un muret, maintien du réseau d’irrigation) et indique simplement « mesure à acter en phase projet : prise en compte des incidences au titre de Natura 2000 » (p.358, RP tome 1), ce qui ne peut être considéré comme suffisant.
D’une manière générale, l’évaluation d’incidences Natura 2000 doit conclure sur les incidences du projet de PLU sur le réseau Natura 2000. En l’espèce, le rapport indique des incidences résiduelles modérées après mesures sur la zone de CLESUD, et l’évaluation ne statue pas de manière claire sur les incidences du plan.
Recommandation 7 : Compléter l’analyse des incidences « Natura 2000 » sur les zones susceptibles d’être affectées par le PLU (en particulier les zones 1AUEb, 1AU et 2AUb) et conclure sur les éventuels effets résiduels significatifs sur l’état de conservation des habitats naturels et des espèces d’intérêt communautaire qui ont justifié la désignation des sites Natura 2000. En cas d’incidences négatives, revoir le projet de PLU afin de respecter la réglementation, et proposer le cas échéant des mesures de compensation précises, localisées et proportionnées en termes de préservation des habitats et des populations d’espèces d’intérêt communautaire.
2.4. Sur le paysage
Grans se trouve à l’interface des paysages de plaine bocagère de Salon-de-Provence (Crau irriguée), de la Crau sèche et des collines de Cornillon-Confoux (massif de Pont de Rhaud). Ces paysages sont identifiés comme remarquables dans l’atlas des paysages des Bouches-du-Rhône,
et la présence du secteur à enjeux des « Plans et collines de Cornillon-Confoux à Grans, site des deux villages » nécessite de veiller au maintien et à la préservation des caractéristiques de ces paysages agraires typiques de l’image provençale, en particulier de :
• préserver les franges des espaces naturels et agricoles,
• maintenir l’agriculture,
• maîtriser l’urbanisation et la pérennisation des structures paysagères majeures (alignements, canaux, haies, etc.).
Bien que peu illustrée, l’analyse paysagère aborde les éléments essentiels de perception et soulève effectivement l’enjeu de traitement des franges. Néanmoins, l’étude n’interroge pas les limites de l’urbanisation compte tenu de la géographie, de la trame arborée et des différents enjeux
écologiques liés à cette organisation spatiale. En particulier pour la zone 1AU des Arènes, le dossier ne présente aucun scénario alternatif, qui permettrait de justifier l’urbanisation de cette zone au regard des équilibres démographiques de la commune, et en conséquence l’impossibilité
d’éviter les incidences sur le paysage.
L’ouverture à l’urbanisation dans ce secteur conduit pourtant à des impacts relativement importants, avec :
• la suppression d’une vaste ouverture visuelle sur un paysage agraire de qualité, typique des paysages de la Crau, constitué d’une prairie pâturée par des moutons, bordé de murets en pierre sèche et de haies de cyprès, portant ainsi atteinte à l’harmonie et à l’intégrité du paysage agricole de la Crau verte aux environs de Grans ;
• une rupture des continuités agricoles et l’enclavement de parcelles résiduelles à l’image du développement urbain des décennies passées, ceci contrevenant aux objectifs de pérennisation du rôle de l’activité agricole dans le fonctionnement des écosystèmes, mais également à la préservation des continuités écologiques imposées par le SRCE et le SCoT.
Les orientations de l’OAP des Arènes ont essayé de prendre en compte les enjeux d’intégration paysagère (et de préservation de la biodiversité, cf. supra) mais le résultat demeure insuffisant.
Par ailleurs, la description et la localisation des mesures de réduction et de compensation des impacts sont absentes.
Recommandation 8 : Présenter l’analyse de solutions de substitution à l’ouverture à l’urbanisation du secteur des Arènes, en qualifiant pour chacune les incidences sur le paysage.
2.5. Sur l’eau potable et l’assainissement
La commune est actuellement alimentée en eau potable par le captage Mary-Rose. La distribution actuelle des champs captants est suffisante pour assurer la production en eau potable à un horizon 2030 mais certains de ces champs captants sont menacés.
L’unicité de cette ressource et la fragilité de la nappe de la Crau dont elle dépend lui confèrent une vulnérabilité certaine. Le rapport indique néanmoins que plusieurs démarches ont été engagées pour secourir la commune en cas de contamination ou de pénurie d’eau (projet de raccordement sur le réseau de distribution de Salon-de-Provence, projet de SDAEP17 à l’échelle du Conseil de Territoire) et pour renforcer l’autonomie de la commune (étude de faisabilité d’un captage supplémentaire, en lien avec le SYMCRAU).
Le règlement impose le raccordement au réseau de distribution public d’eau potable en zones urbaines et à urbaniser. En zone Nb, il autorise la possibilité de se raccorder sur des captages privés en l’absence de réseau public d’eau potable, alors que de nombreux aménagements sont
autorisés dans ces zones, tels que les aménagements légers destinés aux activités sportives et de loisirs, la construction d’équipements publics à vocation sportive, la construction de logements destinés au gardiennage, ainsi que les établissements de restauration et d’hébergement.
Recommandation 9 : Conditionner l’autorisation de constructions en secteur Nb à la mise en place du réseau public d’eau potable.
Concernant l’assainissement, les capacités résiduelles de la station d’épuration sont suffisantes pour satisfaire les besoins futurs de la commune. La carte des zonages d’assainissement collectif
et non collectif est cohérente avec le projet de PLU. L’autorité environnementale souligne par ailleurs l’importance de la mise en œuvre du contrôle et de la mise en conformité de tous les dispositifs d’assainissement non collectif, notamment ceux situés dans le périmètre de protection rapprochée du captage Mary-Rose.
2.6. Sur les risques
Dotée depuis 2002 d’un PPRI18, Grans a été identifiée dans le TRI19 Aix-Salon-de-Provence en 2012. La topographie et le système hydraulique de la zone urbaine l’exposent fortement au risque d’inondation, avec une montée rapide de la Touloubre et de ses affluents en centre-ville (le Vallon,
talwegs des Aréniers et des Gaillères), ainsi qu’un remplissage des cuvettes situées au sud de la commune (quartiers de Camp Jouven et des Pélenches).
Le PLU de 2011 prévoyait l’extension de la zone d’activités de Camp Jouven vers le sud, sur une superficie complémentaire de 26,25 ha. Dans le présent projet de PLU, l’extension a été réduite de 17 ha pour tenir compte de la nouvelle connaissance des risques, notamment apportée par les
études menées par la commune en lien avec les services de l’État.
Les réflexions sur l’exposition aux risques, menées en parallèle de la révision du PLU, ont également conduit à réduire l’extension de la zone d’activités des Pélenches et revoir le projet d’urbanisation. Issus d’une véritable analyse itérative lors de l’élaboration du projet de PLU, ces
choix contribuent à limiter l’exposition des personnes et des biens au risque d’inondation. Cette prise en compte des risques mérite à ce titre d’être soulignée.
D’autre part, la présence du massif de Pont de Rhaud expose la partie sud de la commune au risque d’incendie de forêt, avec des niveaux d’aléas exceptionnel à moyen. L’OAP Les Pélenches gagnerait à faire explicitement figurer les zones à risque dans les documents graphiques et à
préciser les mesures de réduction de la vulnérabilité associées. D’une manière générale, il serait souhaitable d’indicer explicitement les secteurs de la commune exposés aux risques pour une meilleure lisibilité.
2.7. Sur l’énergie, la mobilité, la qualité de l’air et la lutte contre le dérèglement climatique (dont émission GES)
Le rapport dresse une analyse attentive des effets prévisibles des changements climatiques, des enjeux de la qualité de l’air sur ce territoire identifié comme sensible dans le SRCAE20, du potentiel de développement des énergies renouvelables et de l’évolution des émissions de GES21
.
En particulier, l’enjeu d’amélioration de la qualité de l’air est bien identifié, avec une nécessaire rationalisation des déplacements pour diminuer l’importante pollution en dioxyde d’azote et en particules fines. La commune a effectivement pris des mesures de nature à participer au PPA22 des Bouches-du-Rhône et à améliorer la qualité de vie des habitants (zone limitée à 30 km/h dans le noyau villageois, adaptations de voies traduites par des espaces réservés dans le règlement du PLU, projet de liaison piétonne entre le centre et le parc de la fontaine Mary-Rose).
Toutefois :
• l’ouverture à l’urbanisation de la zone 1AU des Arènes conduit à reléguer les équipements publics à l’extrémité ouest de la commune. Bien que des cheminements piétons soient prévus dans l’OAP, l’éloignement de la zone favorisera les déplacements automobiles au détriment de ces modes actifs ;
• l’extension de la zone de CLESUD aura des incidences négatives sur la qualité de l’air, du fait de l’augmentation du trafic routier. Le rapport annonce que « cela est partiellement compensé par le développement des modes de déplacement doux, la limitation de déplacements domicile-travail, le développement du transport multimodal » et que le développement de la zone d’activités « devrait avoir une incidence positive sur la qualité de l’air à une échelle régionale, si le projet se réalise ». Au-delà de cette simple affirmation, aucun élément objectif d’analyse n’est avancé sur les incidences du développement de la plate-forme multimodale rail/route à l’échelle intercommunale, métropolitaine voire régionale.
Les plus-values escomptées du développement des modes actifs et de la limitation des déplacements domicile-travail à l’échelle de la commune paraissent très modestes, comparées à l’explosion attendue localement du trafic routier (camions notamment).
À juste titre, la commune souligne l’importance du renforcement des transports en commun notamment au niveau intercommunal, étant donné l’importance des emplois occupés par les actifs de Grans sur les communes voisines.
Recommandation 10 : Quantifier les incidences prévisibles de l’extension de la zone CLESUD et de la plate-forme multi-modale en termes de rationalisation des déplacements
Consulter l’avis sur le site de la MRAE
Bertrand Rio pour Objectif transition
PS: Le surlignage en couleur est du fait d’Objectif Transition pour signaler certains passages qui nous paraissent importants